On dit que le vendredi 13 porte malchance. Je ne sais pas si le vendredi 13 mars 2020 entrera dans les annales des pires vendredis 13, mais cette journée-là, la Terre s'est mise à tourner carré...
Les écoles ont été fermées, la peur du virus s'est installée, l'économie s'est retrouvée au ralenti et le papier hygiénique est devenu une denrée rare. Les Québécois ont soudainement senti l'urgence de se munir d'une cave à vin digne d'un temps des Fêtes endiablé pour affronter le pire, le confinement.
Du jour au lendemain, le quotidien de la planète s'est vu chambouler. Ce qu'on a compris, et il était temps, c'est que le succès économique ne règle pas tout! La preuve, un microscopique virus, invisible à l’œil nu, a foutu le bordel dans nos habitudes, il a fait déraper nos certitudes. On fuit maintenant comme la peste chaque humain qu'on croise dans la rue, même si on aurait envie de lui sauter dessus pour socialiser. On se parfume au gel désinfectant, on fusille du regard tous ceux qui toussent ou qui éternuent. La peur s'est installée. Même Donald Trump, je suppose, a peur du virus microscopique dévastateur.
L'impuissance, aussi, en a assailli plusieurs... les emplois sont perdus, les économies sont dilapidées pour plusieurs, la maladie a frappé un proche, l'épuisement d'être au front se fait sentir.
Et quand on a des enfants pour qui on souhaite le meilleur, un brillant avenir assuré par des diplômes, on se sent drôlement impuissant aussi. Mon fond profond d'enseignante se questionne, cherche la culpabilité de ne pas être assez là. Mon fond profond d'enseignante aimerait bien continuer comme avant. Mais l'avant, il n'existe plus. Il n'existera jamais plus. Alors que fait-on, maintenant, ici, dans les circonstances actuelles?
Parce que toi, le parent, tu voudrais bien que toutes ces connaissances qui devaient faire partie du programme soient transmises à ta progéniture. Et je comprends. Moi aussi, je voudrais bien les lui transmettre, même virtuellement. L'important, c'est que les p'tits gardent leurs neurones actifs. Oui, y a bien la trousse pédagogique du ministère de l'Éducation qui peut aider. Elle est très bien faite! Mais si ton quotidien de parent est complètement chamboulé par le virus, si tu travailles déjà au front pour sauver la planète et que t'arrives complètement exténué chez toi le soir, si tes enfants sont stressés sans bon sens et que juste gérer le quotidien est une utopie, y a pas la mer à boire si ton enfant apprend la règle du participe passé juste l'an prochain. Ça, comme prof, je peux te dire que je vais le gérer. C'est ma spécialité.
Oui, il y a des élèves qui vont terminer leurs cahiers, qui vont lire, réviser leurs tables, leurs verbes, qui vont faire les travaux proposés par monsieur le ministre. Parce qu'ils le veulent, parce qu'ils aiment ça. Si ton enfant se garde les neurones occupés en jouant aux échecs, en écrivant un journal intime, en construisant des maisons avec ses blocs Légo, s'il apprend l'anglais en regardant raisonnablement la télé, pourquoi pas? Il développera son esprit critique en confrontant l'opinion des journalistes au bulletin de nouvelles, il affinera sa conscience sociale en pensant au groupe avant de penser à son nombril, il apprendra l'entraide en participant aux tâches de la maison. Parce que toi, le parent, t'as aussi besoin de gérer ton stress; t'as pas à tout faire. On vit ça tout le monde ensemble, cette pandémie qui chamboule.
Ton p'tit, il évoluera d'une façon différente de ce qu'il aurait fait sur les bancs d'école, dans la routine que la société capitaliste lui a fait connaitre depuis son arrivée dans ce monde. Dans ce monde en changement. Nous, les profs, on prendra le relais quand ce sera notre tour. On est déjà là en soutien si tu as des questions.
D'ici là, aime ton p'tit (il est peut-être grand), assure-lui un milieu sécuritaire et encadré. (Je sais, la marmaille te tombe sans doute sur les nerfs, d'autant plus qu'elle ne peut plus aller se dégourdir au parc...) Profites-en pour le faire, cet arrêt qui, au bout du compte, nous fera tous un peu de bien quelque part. Suffit de trouver comment.
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